Marché des Innocents, c. 1858
Marché et fontaine des Innocents. Paris Ier. Circa 1858.
- Date : circa 1858
- Auteur : Charles Marville (1813-1879)
- Support : tirage sur papier albuminé, 40 x 50 cm
- Collection : LOC, Washington D.C.
Version haute définition : 2400 x 3012 pixels.
La place du Marché des Innocents occupait le terrain de l’ancien cimetière des Saints Innocents. L’actuelle place Joachim du Bellay en occupe à peu près la moitié.
[Plan du cimetière des Innocents dessiné par Claude-Louis Bernier en 1786, conservé au musée Carnavalet.]
Le 30 mai 1780, l’éboulement d’une fosse commune sur la rue de la Lingerie avait entraîné la fermeture du cimetière des Innocents à toute nouvelle inhumation. À la suite d’un rapport réalisé par Cadet de Vaux, inspecteur général de la salubrité, le conseil du Roi ordonne par arrêté du 9 novembre 1785 la suppression du cimetière, dont les origines remontaient au IXe siècle, et la création à sa place d’un marché aux herbes et légumes.
En 1786, les ossements des grands ossuaires (“charniers”) qui ceinturaient le cimetière sont transférés dans les carrières souterraines de la Tombe-Issoire et le sol (qui était plus haut de presque deux mètres en raison de siècles d’inhumations successives) fut nivelé à hauteur des rues avoisinantes, puis creusé de quelques pieds pour répandre un épais lit de chaux vive. Les ossuaires et l’église du cimetière sont démolis. Le marché peut ouvrir en 1788.
[Vue du cimetière des Innocents, côté de la rue aux Fers, le 21 février 1786, par Charles-Louis Bernier (1755-1830), BNF. Le cimetière était ceinturé d’une galerie-promenoir dont les vastes greniers appelés “charniers” servaient d’ossuaires. Ce dessin présente l’état du cimetière juste avant sa démolition.]
En 1811, on construit des préaux pour abriter les marchands de légumes — nous les voyons sur la photo — et en créant leurs fondations, on devra enlever plus de 70 mètres cubes d’ossements.
À chaque fois qu’il faut faire des travaux dans le secteur, on rencontre d’impressionnantes quantités de restes humains. Quand la superficie de la place est réduite de moitié en 1860, on enlèvera 813 tombereaux d’ossements pendant les travaux.
Le marché aux herbes et légumes est fermé en 1858 et est transféré au nouveau marché central que l’on construit à côté (halles Baltard).
La fontaine des Innocents, datant de 1547-49, faisait partie de l’église des Innocents qui fut détruite en 1786-87, en même temps que son cimetière. Elle était constituée de trois arcades adossées à l’église, une sur la rue Saint-Denis et deux sur la rue aux Fers (rue Berger). Emplacement en jaune vif sur le plan :
L’architecte Quatremère de Quincy (1755-1849) intervint pour que la fontaine due à Jean Goujon (c. 1510-1572) soit sauvée. Elle est soigneusement démontée et on décide de la remonter au milieu du nouveau marché (1788). Pour cette nouvelle configuration en carré, il manquait une quatrième arcade. Sa réalisation est confiée au sculpteur Augustin Pajou (1730-1809). On ajoute un nouveau soubassement doté de bassins en abreuvoir et de lions aux angles, une vasque centrale en bronze, et une coupole au sommet.
La fontaine n’est mise en eau qu’en 1812 (eau du canal de l’Ourcq).
En 1860, le marché aux légumes étant parti aux halles Baltard, on divise la place en deux, la partie ouest sera bâtie et la partie est transformée en square. Il faut à nouveau déplacer la fontaine qui se trouve sur le prolongement de la rue Pierre Lescot. Elle est démontée en 1860 et remontée au centre du square en 1865 sur un nouveau soubassement de l’architecte Gabriel Davioud (1823-1881).
Charles Marville conserve le souvenir de lieux qui vont disparaître ou être profondément modifiés sous peu. Nous voyons sur la photo les préaux de l’ancien marché aux herbes et aux légumes qui vont être démolis. Le marché semble abandonné et l’on commence à dépaver. À gauche, nous voyons l’immeuble neuf qui fait le coin entre la rue Saint-Denis et la nouvelle rue Aubry le Boucher (rebaptisée Berger en 1864). Cette photo immortalise la fontaine des Innocents dans son état juste avant le démontage de 1860.
[Tirage provenant de la collection de l’architecte Richard Morris Hunt (1828-1895).]
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Références. Ne figure pas au catalogue en ligne du musée Carnavalet. BHVP, pas de négatif au Catalogue des bibliothèques municipales spécialisées.
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Quartier des Halles au XIXe siècle :
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Voir également :
Auteur(s) de la notice : Laurent Gloaguen.
Publié initialement le dimanche 22 décembre 2013.
Dernière mise à jour le jeudi 11 décembre 2014.
Article classé dans : Charles Marville > Vues du Vieux Paris.
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