Place Gozlin, c. 1866
Place Gozlin, de la rue de l’École de Médecine. Paris VIe. Vers 1866.
- Date : vers 1866
- Auteur : Charles Marville (1813-1879)
- Format : tirage 2015 d’après négatif restauré numériquement, 35.7 x 24.1 cm
- Collection : GDC
Version haute définition : 3563 x 2400 pixels.
Marville se trouve rue de l’École de Médecine (des Boucheries avant le 5 octobre 1846) et photographie la place Gozlin (place Sainte-Marguerite avant le 24 août 1864). À droite, nous voyons les débouchés des rues de Buci et de l’Échaudé, et à gauche, celui de la rue du Four. Au centre, c’est la rue Gozlin, anciennement Sainte-Marguerite, au fond de laquelle nous distinguons la maison à un étage faisant angle avec la rue des Ciseaux (actuel no 1, rue Gozlin).
Le Grand bazar de l’Abbaye (maison Chervet) a été construit à la place de la prison de l’Abbaye démolie en 1854.
Tout ce que nous voyons ici doit disparaître pour le prolongement du boulevard Saint-Germain, à l’exception de la maison tout à droite 1, faisant coin avec la rue de Buci, et des maisons tout au fond qui encadrent le débouché de la rue des Ciseaux. 1. Maison Gallois jeune, nouveautés, 42, rue de Buci, 2, rue Sainte-Marguerite et 33, rue de l’Échaudé, aujourd’hui café Mabillon.
Les maisons au coin des rues du Four et Gozlin (nos 1, 1 bis, 1 ter, rue Gozlin, et 2, 2 bis, 2 ter, rue du Four) sont démolies en 1868 2. 2. Adjudication des matériaux à provenir de la démolition le 27 avril 1868.
Le prolongement du boulevard Saint-Germain entre le boulevard Saint-Michel et le quai d’Orsay a été déclaré d’utilité publique par décret du 28 juillet 1866. La partie entre le quai d’Orsay et la rue de Bellechasse sera achevée en 1870, mais il faudra attendre 1877 pour que le prolongement jusqu’au boulevard Saint-Michel soit achevé.
Le plan parcellaire des propriétés à exproprier pour le prolongement du boulevard entre la place Gozlin et la rue d’Erfurth est publié en février 1875. Les matériaux à provenir des démolitions sont adjugés en janvier 1877. Les démolitions de ce secteur sont réalisées en février-avril 1877. Le boulevard est achevé sur toute sa longueur en octobre 1877.
Position de Marville. [1600 x 1000 px.]
MARGUERITE-SAINT-GERMAIN (PLACE SAINTE-). Commence aux rues du Four, no 2, et de Buci, no 42 ; finit a la rue Sainte-Marguerite, nos 5 et 8. Sa longueur est de 40 m. — 10e arrondissement, quartier de la Monnaie.
Sur le plan de Verniquet elle se trouve confondue avec la rue Sainte-Marguerite, dont elle portait la dénomination. Les registres des contributions de 1791 à 1805 la désignent ainsi : marché de Bussy. — Conformément à une décision ministérielle du 2 messidor an VIII, signée L. Bonaparte, la forme de cette place devait être circulaire. Cette disposition a été modifiée par une ordonnance royale du 29 avril 1839, qui assigne à cette voie publique une moindre largeur de 32 m. Cette place vient d’être augmentée de tout le terrain occupé par l’ancienne prison de l’Abbaye, dont nous allons rappeler l’origine.
Le pilori de l’ancienne abbaye Saint-Germain-des-Prés existait encore, en cet endroit, au seizième siècle. Il fut remplacé par une prison destinée aux militaires. Dans le cours de la révolution, la prison de l’Abbaye, dans laquelle étaient enfermés des détenus de tout âge et de diverses conditions, fut le théâtre de scènes sanglantes. Le 30 juin 1789, la populace se porta à cette prison pour délivrer les gardes françaises écroués disciplinairement à l’Abbaye. Ces militaires avaient écrit à une espèce de club permanent, qui tenait ses séances au café de Foy ; ils s’étaient posés en victimes de leur patriotisme. Cette lettre fut lue en public et causa une telle émotion, que la populace marcha sur l’Abbaye pour délivrer les soldats patriotes. La foule grossit en chemin, les portes de la prison furent enfoncées, les prisonniers délivrés et portés en triomphe dans les rues de Paris. Deux détachements de dragons et de hussards avaient voulu réprimer cet acte de sédition, mais le peuple les arrêta, leur versa du vin et bientôt dragons et hussards crièrent vive la nation !
Au 1er septembre 1792, la prison de l’Abbaye contenait 234 détenus ; 133 furent massacrés, 3 se suicidèrent, et 97 furent mis en liberté. Parmi les 133 captifs mis à mort, on comptait 18 prêtres. Entre les deux guichets qui séparaient la prison du lieu de l’exécution, on avait improvisé un simulacre de tribunal composé de douze individus, pris au hasard et remplissant les fonctions de jurés. Ce tribunal était présidé parle fameux Maillard, surnommé Tape-dur. Ces jurés avaient devant eux une grande table sur laquelle se trouvait le registre des écrous. L’instruction des causes était sommaire et l’interrogatoire rapide. Le prisonnier jugé coupable était condamné par une formule dont le sens était ignoré des accusés. À la Force ! disait le président, et chaque condamné, dès qu’il avait quitté la salle, était massacré à coups de sabre. Les prisonniers absous étaient mis en liberté, et reconduits chez eux aux cris de vive la nation !
Au nombre des prisonniers détenus à l’Abbaye pendant la première révolution, le livre d’écrous a enregistré les noms du duc de Beaujolais, de Sombreuil, de Cazotte, de Journiac de Saint-Méard, de Barnave et de Charlotte Corday. L’abbé Lenfant, l’abbé Chapt de Rastignac et M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères sous Louis XVI, y périrent lors des massacres de septembre. Le ministre des finances Clavières s’y frappa de trois coups de couteau pour s’épargner la guillotine. — Le 18 brumaire an II (10 novembre 1793), madame Roland sortit de cette prison pour monter sur l’échafaud.
Après la révolution, l’Abbaye redevint prison militaire. Le général Malet y fut enfermé pendant plusieurs jours. Le général Bonnaire, qui avait si vaillamment défendu la ville de Condé en 1815, y fut également emprisonné. Condamné à la déportation et dégradé sur la place Vendôme en 1816, le général Bonnaire mourut de chagrin deux mois après cette exécution militaire dans la prison de l’Abbaye. Miéton, aide de camp du général, fut condamné à mort, et ne sortit de l’Abbaye que pour être fusillé.
Le général Thiard, petit-neveu du cardinal de Bissy, les généraux Belliard et Decaen, furent aussi détenus à l’Abbaye.
Depuis la construction de la prison de la rue du Cherche-Midi, l’Abbaye était devenue inutile ; on l’a démolie en 1854.
[Félix et Louis Lazare. Dictionnaire administratif et historique des rues et monuments de Paris. Paris, Bureau de la Revue Municipale, 1855.]
Prison de l’Abbaye, vers 1852. Charles Marville. Tirage sur papier albuminé d’après un négatif papier (calotype). BHVP. [2200 x 1722 px.]
Démolition de la prison de l’Abbaye, avril 1854. Charles Marville. Tirage sur papier albuminé d’après un négatif papier (calotype). Musée Carnavalet. [2200 x 1628 px.]
À gauche, publicité peinte “Ba-ta-clan […] Tous les soirs grand concert […] Le géant chinois”. Cf. rue du Four.
Publicité “Photographie Frantz Liouville”. Actif à partir de 1866 au 111, rue de l’École de Médecine. Successeur de Charles Mammès Leymarie (1829-1876). Plus connu pour sa carrière de compositeur de musique légère et chansonnettes.
Datation de la prise de vue : vers 1866, avant mai 1868.
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No 235 | Place Gozlin, de la rue de l’École de Médecine. Vers 1866. | ||
State Library of Victoria | Musée Carnavalet | BHVP (négatif) | |
— | CARPH000851 | NV-004-C-0016 | |
— | 35.4 x 24.2 | 38 x 29 | |
— | 1865-1868 | vers 1868 |
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Voir également :
Auteur(s) de la notice : Laurent Gloaguen.
Publié initialement le mercredi 30 septembre 2015.
Dernière mise à jour le mardi 30 mai 2017.
Article classé dans : Charles Marville > Vues du Vieux Paris.
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