Affaissement de la place de l’Alma, 1915
Affaissement de la place de l’Alma. Paris XVIe. 8 novembre 1915.
- Date : 1915
- Auteur : Agence photographique Rol, Paris
- Support : négatif sur verre, 5 x 7 po (13 x 18 cm)
- Collection : BNF, Paris
Version haute définition : 3404 x 2400 pixels.
Effondrement de la chaussée à la suite des travaux de percement du métropolitain.
Les travaux de la ligne 9 ont commencé en 1911, et la première section a été mise en service en 1922. La station Alma-Marceau ouvre le 27 mai 1923.
Place de l’Alma, le sol s’entr’ouvrit hier matin
Un singulier accident s’est produit, hier matin, place de l’Alma, et il est vraiment extraordinaire qu’il n’ait déterminé aucun accident de personne.
Les faits nous ont été ainsi racontés par un témoin :
— Il était exactement sept heures. Les gens qui traversaient la place entre le refuge devant lequel stationne le tramway venant de l’Étoile et le bureau des omnibus, situé en bordure du terre-plein du cours la Reine, sentirent brusquement le sol vaciller sous leurs pas.
Quelques cris de femmes apeurées, une fuite d’une dizaine de personnes, mais rien de grave. Les témoins se retournèrent. Au milieu de l’immense place, le terrain s’était brusquement affaissé, formant une sorte d’excavation, qui atteignait en divers endroits un mètre de profondeur. C’était un trou quelque peu rectangulaire, sur une longueur de quarante mètres et autant de largeur.
Près du refuge-station, deux candélabres, fortement penchés en avant, s’infléchissaient comme s’ils allaient faire un plongeon dans l’abîme subitement ouvert devant eux. Le refuge lui-même avait pris une forme bizarre.
Au-delà, le sol apparaissait fortement vallonné, comme s’il avait cédé sous la pression d’une poussée vigoureuse.
Bientôt arrivèrent MM. Bouvier, commissaire divisionnaire ; Parnet, commissaire du quartier ; puis M Joltrain, inspecteur divisionnaire de la circulation, qui prirent les mesures les plus urgentes. Des agents fichèrent en terre tout autour de l’excavation, sur un diamètre de cent mètres, de forts pieux qui furent reliés entre eux par un câble métallique qu’il fut interdit à quiconque de franchir.
En même temps, des gardiens, postés au débouché des différentes avenues et du pont de l’Alma, avaient ordre de faire rebrousser chemin aux voitures arrivant avec l’intention de déboucher sur la place. Automobiles, fiacres, camions devaient prendre une autre direction.
Quant aux tramways venant soit de l’Étoile, soit de l’École militaire, soit de Versailles, Saint-Cloud, Passy, soit du Louvre ou de l’Hôtel de Ville, ils s’arrêtaient à proximité de la place et leurs voyageurs, sous la direction de gardiens de la paix, étaient transbordés dans d’autres véhicules qui attendaient de l’autre côté.
Les causes de l’accident
Nous avons demandé, à M. Joltrain, son avis sur les causes de l’accident.
Sous la place de l’Alma, nous dit-il, ont été entrepris des travaux pour l’aménagement de la ligne partant de l’Opéra et s’acheminant vers Saint-Cloud.
Cette ligne est établie sur un sol sablonneux et, depuis longtemps, une machine, servant à épuiser les eaux, fonctionnait à cet endroit. C’est à l’état sablonneux du sol que doit être attribué l’accident.
La voûte et les pieds-droits du tunnel étaient achevés ; Ies ouvriers terminaient la construction du radier lorsque, ce matin, les pieds-droits se sont mis à fléchir, entraînant l’affaissement de la voûte sur une longueur de quarante mètres et par suite celle du sol.
En même temps, une galerie, passant à proximité de la ligne, a également fléchi, et le tunnel s’est trouvé inondé. La voûte n’a pas encore cédé, mais son écroulement reste toujours à craindre.
Quant au collecteur Marceau, passant à proximité du tunnel, comme il n’a nullement été touché, l’accident se trouve heureusement localisé.
Il est fort heureux qu’au moment de l’accident aucun ouvrier ne se trouvât dans le tunnel. L’équipe de nuit était partie ; l’équipe de jour ne devait entrer en service qu’à sept heures et quart. Un quart d’heure plus tard, une catastrophe se fût produite.
À la suite des expériences auxquelles il a été procédé dans la soirée, il a été décidé que tous les tramways de la Compagnie des omnibus traversant la place de l’Alma reprendront leur trafic aujourd’hui. On ne transbordera plus les voyageurs ; les véhicules avanceront lentement sur le point dangereux.
Quant aux tramways allant de Pereire ou de l’Étoile à Montparnasse, la compagnie sera tenue de faire effectuer, pendant plusieurs jours encore, le transbordement des voyageurs, l’une des voies passant au bord de l’excavation.
[Le Petit Parisien. 9 novembre 1915.]
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Auteur(s) de la notice : Laurent Gloaguen.
Publié initialement le vendredi 14 mars 2014.
Dernière mise à jour le jeudi 11 décembre 2014.
Article classé dans : Agence Rol.
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1. Le 14 mars 2014,
grégory
Impressionnant !...Savez-vous si des bâtiments ont subi le même sort suite aux travaux de percement pour le métro?
2. Le 14 mars 2014,
Olivier
J'en profite pour raconter une anecdote métropolitaine, non vérifiée. Mes arrière-grands-parents qui habitaient 116 rue de Rivoli à l'époque de la construction de la ligne 1 du métro se seraient fait voler toutes leurs bouteilles de vin, les caves ayant été cambriolées à l'occasion du chantier racontait ma grand-mère... Il est vrai que cette ligne peu profonde doit se trouver au niveau des sous-sols des immeubles.
3. Le 14 mars 2014,
Vergue
@grégory : pas à ma connaissance, mais c'est possible.
@Olivier : aha, une anecdote très savoureuse :-)
4. Le 14 mars 2014,
Matoo
Quelques cris de femmes apeurées... Huhuhu. 1915 en force quoi ! :D