Henri IV et la Seine, c. 1840
La Seine, le Louvre et la statue d’Henri IV. Paris. Circa 1840.
- Date : circa 1840
- Auteurs : Vincent Chevalier (1770–1841)
- Support : daguerréotype, 20.5 x 15 cm
- Collection : collection particulière
Version haute définition : 2300 x 2940 pixels.
Cette image a été prise de l’immeuble qui fait angle avec le quai des Orfèvres (une maison à trois adresses : nos 76, quai des Orfèvres, 15, place du Pont-Neuf et 31, place Dauphine).
L’auteur de ce daguerréotype est l’opticien Vincent Chevalier — l’étiquette collée au dos, sur le carton d’époque, en témoigne. Comme Vincent Chevalier était un opticien de l’île de la Cité, certains pourraient croire qu’il a fait cette image de sa fenêtre, mais ce n’est pas le cas : son adresse était au no 69 du quai de l’Horloge (devenu aujourd’hui le no 29).
Ce qui est amusant, c’est que ce daguerréotype a quand même été fait de la fenêtre d’un opticien, qui plus est nommé Chevallier — “Chevallier” avec deux “L”, cela a son importance.
Il y avait de nombreux opticiens sur l’île de la Cité au milieu du XIXe siècle, y compris plusieurs “Cheval(l)lier”, ce qui est la source de bien des erreurs, encore aujourd’hui, et surtout à l’époque : vers 1830, Vincent Chevalier se devait de préciser dans un document sur le microscope achromatique que “Trois opticiens du même nom sont sur le même quai — M. CHEVALIER aîné prie de faire attention qu’il a le prénom de Vincent et qu’il est au no 69 du quai de l’Horloge afin qu’il n’y ait pas d’erreur préjudiciable à chacun d’eux”. [Cf. Patrice Guérin.]
La maison qui correspond à la réalisation de ce daguerréotype est celle de l’Ingénieur Chevallier [Jean Gabriel Augustin Chevallier (1778-1848), remplacé à partir de 1866 par son gendre Ducray-Chevallier].
Nous devons donc comprendre que Vincent Chevalier est allé faire ce daguerréotype de l’une des fenêtres de son confrère Jean Chevallier, domicilié au no 15 de la place du Pont-Neuf. Ce qui n’a rien d’impossible et prouve une certaine communication entre les premiers artisans du daguerréotype.
L’Ingénieur Chevallier se doit lui aussi de préciser sans cesse que “Chevallier, opticien sur l’île de la Cité”, n’est pas une adresse suffisamment précise :
Qu’il me soit permis de faire observer aux personnes qui placent en moi leur confiance, qu’il est impossible de se tromper sur la situation de mon domicile. Depuis 1740 par ma famille, et 1796 par moi, j’occupais la Tour de l’Horloge du Palais, située à l’angle du quai, en face du marché aux Fleurs… Les travaux du Palais de Justice m’ayant obligé de changer de domicile, mes magasins sont transportés place du Pont-Neuf No 15, à Paris, au coin du quai des Orfèvres, vis-à-vis de la statue de HENRI IV. C’est là seulement où se trouvent les instruments construits dans mes ateliers, attendu que je n’ai aucun dépôt à Paris ni dans les départements.
[L’ingénieur Chevallier, vers 1843, ibid.]
Et pour brouiller les pistes des amateurs de primitifs de la photographie, retenons aussi qu’il y a un second opticien qui a des fenêtres sur la place du Pont-Neuf, c’est Noël-Jean Lerebours (1761-1840), qui est à l’angle du quai de l’Horloge. La maison Lerebours sera reprise en 1840 par son fils adoptif, Noël-Marie Lerebours (1807-1873), qui s’associera avec Marc Secretan (1804-1867).
[Étiquette au dos du daguerréotype.]
[Anonyme, circa 1852. Musée Carnavalet, CARPH010385. On voit bien l’enseigne “L’Ing. Chevallier Opticien”. Les dernières boutiques du Pont-Neuf ont été détruites en 1853.]
[Vincent Chevalier (1770–1841) travaille avec son fils Charles (1804-1859) de 1820 à 1830. Charles Chevalier part s’établir à son compte au Palais-Royal en 1831, et c’est le fils Arthur (1830-1874) qui reprendra la direction de la maison de l’île de la Cité en 1859.]
Un autre daguerréotype attribué à Vincent Chevalier, daté de 1839, représentant aussi le Pont-Neuf, est conservé par le Peabody Essex Museum à Salem (Massachusetts).
Pour mémoire, rappelons que Vincent Chevalier était le fournisseur de Niépce et de Daguerre en optiques et camerae obscurae.
Enfin, notons un détail : vous pouvez voir un homme allongé sur le banc à droite.
[Vente Sotheby’s du 11 novembre 2011 à Paris, 70 350 € au marteau. Image inversée pour une meilleure lecture.]
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Auteur(s) de la notice : Laurent Gloaguen.
Publié initialement le jeudi 6 mars 2014.
Dernière mise à jour le lundi 26 mai 2014.
Article classé dans : Autres auteurs.
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1. Le 7 mars 2014,
Jérôme
Savez-vous ce que sont les masses "touffues" sur ce qui semble être des barges à droite, devant et sous la passerelle des Arts?
2. Le 7 mars 2014,
Vergue
Je ne sais pas, peut-être du foin, il faudrait vérifier. Paris et ses chevaux en faisaient grande consommation.
3. Le 29 septembre 2015,
Jean
Bonjour, vous serait-il, à tout hasard, possible de mettre en ligne une version haute résolution de la photo anonyme de 1852? Merci! Jean