Un zeppelin bombarde Ménilmontant, 1916
Le 30 janvier 1916, dans le quartier de Ménilmontant à Paris, la foule observe le cratère produit par une bombe larguée d’un zeppelin allemand.
- Date : 1916
- Auteur : Agence photographique Rol, Paris
- Support : négatif sur verre, 5 x 7 po (13 x 18 cm)
- Collection : BNF, Paris
Version haute définition : 2000 x 2771 pixels.
Dans la soirée du 29 janvier 1916, deux zeppelins prennent leur envol pour mener un raid sur Paris. L’un fait demi-tour en raison de problèmes mécaniques. L’autre poursuit la mission et largue 18 bombes sur la capitale. On dénombre 26 morts et 32 blessés. Les bombes sont surtout tombées dans le XXe arrondissement, dans les quartiers de Belleville et de Ménilmontant.
Le négatif est légendé “Raid d’un zeppelin sur Paris, 100, rue de Ménilmontant”, mais il me semble que l’adresse n’est pas la bonne. Si un lecteur arrive à identifier le lieu sur la photo… qu’il se manifeste dans les commentaires.
[Mise à jour : il s’agit en fait de la rue Sorbier, à la hauteur du 70, rue de Ménilmontant.]
À la une du Petit Parisien du 30 janvier 1916 (numéro 14237), on pouvait lire ce compte rendu des événements de la veille, abondamment caviardé des détails géographiques par la censure :
Les Boches ont renouvelé, hier soir, leur criminel attentat de mars 1914 sur Paris. Cette fois, malheureusement, il y a plusieurs morts et d’assez nombreux blessés.
L’alerte. Il était dix heures, exactement.
Depuis quelques minutes, les promeneurs, nombreux sur les boulevards, sollicités par la température exceptionnellement printanière, se montraient surpris de voir que des équipes d’agents éteignaient, rapidement, les becs de gaz et coupaient l’allumage des lampes électriques.
— Les zeppelins ! Les zeppelins !…
La foule, rapidement, comprit qu’il y avait une alerte et, presque ironiquement, poussa des cris divers.
— Non ! disaient les uns, ce ne sont pas des zeppelins, ce sont des “taubes” qui sont signalés.
[Taube : (Mot allemand qui signifie pigeon) Avion allemand monoplan dont la forme générale rappelle celle d’un oiseau en plein vol.]
Et les yeux fouillaient le ciel, mais on n’y voyait, au milieu de nuages noirs, que quelques étoiles tranquilles.
Cependant bientôt les pompiers, en vitesse, firent leur apparition. Ils dévalaient les rues principales de la grande ville, juchés sur leurs autos rapides, et jetaient l’alarme de leurs clairons sonnant le “Garde à vous !”.
Au lieu de se disperser, les Parisiens qui se trouvaient dans les principales artères se groupèrent et, narguant le danger, lancèrent, vers le firmament, des injures et des menaces :
— À mort ! À mort les Boches, tous les Boches !…
Comme, après le passage des pompiers, on n’entendait aucune détonation de la défense de Paris, le public manifestait déjà sa déception. D’aucuns parlaient de s’aller coucher.
— Fausse alerte !
— Il n’y a rien de fait !
Hélas l’alerte n’était que trop justifiée. À neuf heures vingt, deux aéronats allemands — des zeppelins, disait-on — avaient été signalés de la Ferté-Milon, se dirigeant sur Paris [Passage blanchi par la censure.]
Ils s’avançaient toujours, résistaient aux attaques dont ils étaient l’objet de la part de nos avions.
Détonations successives. Soudain deux sourdes, et pourtant formidables détonations se firent entendre du côté de […] C’étaient, assurément des bombes. On ne s’y pouvait tromper au son mat qu’elles avaient rendu.
Cependant, aucune panique ne s’empara des curieux qui continuèrent de se montrer, dans le ciel, les projecteurs dont la lumière nébuleuse cherchait toujours à déceler les appareils ennemis et éclairait nos avions qui partaient en chasse.
Successivement retentirent plusieurs autres détonations, toutes semblant provenir également du […]e arrondissement.
Dix bombes sont tombées. À la préfecture de police on apprenait bientôt que dix bombes étaient tombées sur […] et sur […].
Les deux premières avaient atteint le numéro […] de la rue […] blessant plusieurs locataires.
La troisième était tombée rue […], produisant seulement une excavation profonde sur la chaussée.
La quatrième était venue trouer la voûte du Métro, sans qu’on eût à déplorer de victime.
La cinquième et la sixième avaient fait plusieurs blessés.
La septième avait atteint un immeuble sis […].
La huitième avait blessé quinze personnes au numéro […] de la rue […] causant des dégâts très importants.
La neuvième était tombée, tuant six personnes — trois femmes, deux enfants et un homme — on comptait ici, en outre, une blessée.
La dernière, tombée rue […] s’était bornée à enfoncer la chaussée, sans faire de victime.
Dès la première nouvelle, MM. Laurent, préfet de police ; Paoli, secrétaire général ; Chanot, chef de la police municipale ; Paul Guichard, directeur adjoint de la police judiciaire ; Perrot des Cachons, chef des bureaux de la police municipale, s’étaient transportés dans les quartiers atteints et avaient pris la direction des secours. Des services d’ordre avaient été hâtivement organisés pour tenir à distance la foule énorme attirée par les détonations.
Partout, de nombreux agents coopéraient au sauvetage des victimes, tandis que les pompiers des diverses casernes de Paris et ceux de l’état-major éteignaient, ici et là les commencements d’incendie qui s’étaient déclarés.
M. Kling, directeur du laboratoire municipal, se transportait, de son côté, sur les lieux sinistrés, pour ramasser les débris des engins, lancés par le zeppelin, et les analyser plus tard.
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Auteur(s) de la notice : Laurent Gloaguen.
Publié initialement le mercredi 2 octobre 2013.
Dernière mise à jour le jeudi 23 janvier 2014.
Article classé dans : Agence Rol.
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1. Le 3 octobre 2013,
karl, La Grange
Boulevard Ménilmontant semble une possibilité, vue la largeur plus que la rue Ménilmontant.
2. Le 27 octobre 2013,
Benjamin
Non, c'est la placette au coin de la rue Sorbier avec la rue de Ménilmontant. L'abri en briques colorées et structure métallique art nouveau existe encore, même s'il est un peu fatigué. J'essayerai de faire une photo avec le même point de vue lorsque j'y repasserai.
Voilà le plus proche que j'arrive à faire avec street view :
https://maps.google.fr/?ll=48.86871...
De l'autre coté (si on se tourne vers sa droite) il y a le passage de la petite ceinture et une plaque commémorative de l'attaque de trains allemands par le groupe de Madeleine Riffaud en 44. Photographié par moi ici :
http://www.flickr.com/photos/720542...
3. Le 27 octobre 2013,
Vergue
@Benjamin : vous avez raison, on reconnait bien avec Google Street View l'immeuble de l'horloger comme étant le 4 rue Sorbier, qui n'a pas changé depuis la photo. Nous sommes donc à la hauteur du 70 rue de Ménilmontant.
Merci de cette identification.
4. Le 29 avril 2014,
JL
cet abri en briques colorées, c'est quoi ? Quelqu'un sait ? Merci
5. Le 29 avril 2014,
Vergue
Je ne sais pas. Intuitivement, j'aurais dit que c'est lié au métropolitain, genre poste de redressement électrique. Mais il n'y a pas de ligne de métro à cet endroit (cependant, des voies de la Petite ceinture).
6. Le 25 janvier 2015,
bidault philippe
le frere de mon arrière grand père Georges Henri BIDAULT, alors en permission est décédé dans ce bombardement au 34 Rue Borrégo PARIS 20 ème. Je possède le journal " LE MIROIR " du dimanche 13 février 1916 où on y consacre 4 pages complètes.