Rue Neuve Guillemin, c. 1867

Marville : rue Neuve Guillemin

Rue Neuve Guillemin, de la rue du Vieux Colombier. Paris VIe. Vers 1867.

Version haute définition : 2600 x 3258 pixels.

Marville se trouve dans la rue Neuve Guillemin, près du débouché sur la rue du Vieux Colombier, et photographie en direction de la rue du Four. Tout au fond, c’est l’immeuble faisant angle entre les rues du Four et du Sabot.

La rue Neuve Guillemin va entièrement disparaître en octobre-décembre 1867 en raison du prolongement des rues de Rennes et du Gindre (rue Madame depuis 1877).

De 1838 à 1846, Eugène Delacroix avait un atelier d’élèves dans cette rue. Eugène Lambert (1825-1900), peintre des chats, y a entre autres étudié.

Expropriations de 1867

Plan des expropriations de 1867. Le no 28 (parcelle 54 bis), qui appartenait déjà à la ville, avait été démoli en mai 1866. [1600 x 1000 px.]

Plan rue Neuve Guillemin

Position de Marville. [1600 x 1000 px.]

GUILLEMIN (RUE NEUVE-). Commence à la rue du Four-Saint-Germain, nos 53 et 55 ; finit à la rue du Vieux-Colombier, nos 14 et 16. Le dernier impair est 23 ; le dernier pair, 28. Sa longueur est de 110 m. —11e arrondissement, quartier du Luxembourg.

En 1546, c’était la rue de Cassel, parce qu’elle conduisait à l’hôtel de ce nom. Elle prit ensuite la dénomination de rue de la Corne, en raison d’une enseigne de corne de cerf qu’on voyait au coin de la rue du Four. Son dernier nom de Guillemin lui vient d’une famille qui possédait un grand jardin bordant un côté de cette rue. — Une décision ministérielle du 23 frimaire an IX, signée Chaptal, fixa la largeur de cette voie publique à 7 m. En vertu d’un arrêté du Président de la République L. N. Bonaparte, du 17 janvier 1849, cette largeur devra être portée à 10 m. La maison no 2 est seule à l’alignement.

[Félix et Louis Lazare. Dictionnaire administratif et historique des rues et monuments de Paris. Paris, Bureau de la Revue Municipale, 1855.]

La mention “en 1546, c’était la rue de Cassel, parce qu’elle conduisait à l’hôtel de ce nom” est une erreur chez les Lazare. La rue de Cassel était un ancien nom de la rue Beurrière (ainsi que de la rue Cassette) et la rue Neuve Guillemin a été percée plus tard, au XVIIe siècle.

Les recherches d’Adolphe Berty révèlent que le nom de Guillemin vient de la propriété de maître Guillemin, auditeur de la Chambre des Comptes, sur laquelle la rue a été percée vers 1631. L’erreur des Lazare remonte aux écrits de Jean-Baptiste Michel Renou de Chauvigné dit Jaillot (en 1775) : “on l’appeloit, en 1456, le rue de Cassel, parce qu’elle conduisoit à l’Hôtel & aux Jardins de Cassel”, les Lazare faisant par ailleurs une coquille de 110 ans (1546 au lieu de 1456).

Berty note en préambule de sa démonstration : “Jaillot a commis à propos de cette rue une erreur analogue à celle dans laquelle il est tombé à l’occasion de la rue du Cœur Volant. Il a avancé en effet que la rue Guillemin était la voie ancienne qui conduisait de la rue du Four au territoire de Cassel, tandis qu’il considérait la rue Beurrière comme moderne ; c’est le contraire qui est vrai”.

L’observation de plans permet de découvrir qu’il y a eu, pour une raison que j’ignore, une confusion entre ces deux rues et un certain flottement toponymique dans les années 1716-1737 :

PlanAnnéeNom “Beurrière”Nom “Guillemin”
Boisseau1648Rue de la CorneNon figurée
Gomboust1652Rue de la Petite CorneRue Guillemin
Bullet et Blondel1676Rue de la Petite CorneRue Guillemin
Monbard1694Rue de la CorneRue Guillemin
Nolin1699Rue de la CorneRue Guillemin
Roussel1703Rue de la CorneRue Guillemin
De Fer1705Rue de la CorneRue Guillemin
Roussel1713Rue de la CorneRue Guillemin
Roussel1716Rue BernauteRue Guillemin ou de Corne
Delisle1716Rue BerneuseRue de la Corne
Delisle1730Petite rue de la CorneRue Guillemin
Roussel1730Rue de la CorneRue Guillemin
Delagrive (manus.)1733Rue de la CorneRue Guillemin
Delagrive1733Petite rue de la CorneRue de la Corne
Delagrive1737Petite rue de la CorneRue de la Corne
Turgot1739Rue de la CorneRue Guillemin
Delagrive1740Rue de la CorneRue Guillemin
Delagrive1741Rue BeurièreRue Guillemin
Nolin1744Rue de la CorneRue Guillemin
Delagrive1744Rue BeurièreRue Guillemin
Crépy1750Rue de la CorneRue Guillemin
De Vaugondy1760Rue BeurièreRue Guillemin
Jaillot1762Rue BeurièreRue Neuve Guillemin
Lattré1765Rue BeurièreRue Neuve Guillemin
Desnos1772Rue BeurièreRue Neuve Guillemin
Esnauts et Rapilly1780Rue BeurièreRue Neuve Guillemain
Desnos1782Rue BeurièreRue Neuve Guillemin
Brion de Latour1782Rue BeurièreRue Guilmain
Esnauts et Rapilly1787Rue BeurièreRue Guillemin
Picquet1804Rue BeurièreRue Neuve Guillemin
Girard1820Rue BeurrièreRue Neuve Guillemin
Vasserot1828-1830Rue BeurrièreRue Neuve Guillemin

La situation cartographique est claire jusqu’en 1713, la rue neuve a toujours porté le nom de Guillemin, et la rue Beurrière connaît différentes variantes : rue de la Corne, rue de la Petite Corne et petite rue de la Corne. La dénomination Beurrière apparaît vers 1740, et Neuve Guillemin vers 1760.

Sur le plan manuscrit de 1733 attribué à Jean Delagrive, conservé à la BNF, on voit la rue Guillemin et la rue de la Corne, ce qui est conforme à l’usage des cartographes précédents, mais sur un plan imprimé du même auteur et de la même année (Neuvième Plan de Paris, voir sur Gallica), la rue Guillemin devient la rue de la Corne et la rue Beurrière est la Petite rue de la Corne. Sur le plan de Turgot en 1739, ce sont pourtant encore les rues Guillemin et de la Corne. Nous observons aussi que Delagrive revient en arrière en 1740, la rue Beurrière redevenant de la Corne, ce qui me laisse penser qu’il s’agit d’une erreur et non d’un véritable usage.

C’est peut-être ce flottement toponymique dans les années 1710-1730 qui a conduit Jaillot à des conclusions hâtives en 1775, attribuant à la rue Guillemin des propriétés de la rue Beurrière, conclusions reprises, sans crédit ni vérification, par de nombreux auteurs du XIXe siècle.

Suite au décret d’utilité publique du 28 juillet 1866, la rue de Rennes, créée en 1854 du boulevard du Montparnasse à la rue de Vaugirard, va être prolongée en avril-septembre 1867 jusqu’à la rue du Vieux Colombier et d’octobre 1867 à avril 1868 jusqu’à l’église Saint Germain des Prés.

La suppression des rues Beurrière, Neuve Guillemin, et de l’Égout, est déclarée d’utilité publique dans le décret du 28 juillet 1866 relatif à la rue de Rennes prolongée et ses abords.

Datation de la prise de vue : vers 1867, début octobre 1867 au plus tard.

No 202Rue Neuve Guillemin, de la rue du Vieux Colombier. Vers 1867.
State Library of VictoriaMusée CarnavaletBHVP (négatif)
CARPH000836NV-004-C-0570
27.4 x 33.628.6 x 37.9
1865-1868vers 1866

Position estimée