Place Dauphine, c. 1865
Place Dauphine, vers le pont Neuf. Paris Ier. Vers 1865.
- Date : vers 1865
- Auteur : Charles Marville (1813-1879)
- Support : tirage sur papier albuminé, 35.5 x 25.2 cm
- Collection : BHDV, anct bibliothèque de la préfecture de la Seine
Version haute définition : 3661 x 2600 pixels.
Marville se trouve au deuxième étage d’une maison de la place Dauphine, probablement le no 6, aujourd’hui disparu. L’objectif est pointé sur le 27, place Dauphine.
Sur la place, nous voyons la fontaine Desaix qui fut installée en 1802 et sera démontée en 1874 (voir plus bas). Elle est entourée de candélabres ancien modèle.
La photo n’est pas prise du niveau du sol, ce qui est rare dans l’album dit du Vieux Paris. Elle a été réalisée de la fenêtre d’un bureau au premier étage de la préfecture de Police.
La place Dauphine, jugée indigne de faire face au nouveau palais de Justice, devait entièrement disparaître. Seul son côté sur la rue de Harlay sera en fin de compte démoli (en 1874).
DAUPHINE (PLACE). Commence à la rue Harlay, nos 10 et 12 ; finit à la place du Pont-Neuf, nos 13 et 15. Le dernier impair est 31 ; le dernier pair 28. Sa longueur est de 121 m. — 11e arrondissement, quartier du Palais-de-Justice.
Sur le terrain occupé par cette place, on voyait autrefois deux îles ; la plus grande s’appelait l’île au Bureau. Elle tirait sa dénomination de Hugues Bureau, qui, le 5 février 1462, acheta cet emplacement moyennant 12 deniers de cens et 10 sols de rente annuelle. L’île voisine était moins large, mais plus longue, son nom d’île à la Gourdaine lui venait du moulin dit de la Gourdaine.
« L’an mil six cent sept, Henry, par la grâce de Dieu, etc.… Veu le contract cy attaché soub le contr’scel de nostre chancellerie, fait et passé entre les sieurs de Belliêvre, chevalier, chancellier de France, et de Sully, pair de France, et Isaac Arnaud nostre conseiller, pour nous et en nostre nom… d’une part et nostre amé et féal conseiller en nos conseils et premier président en nostre cour de Parlement, messire Achille de Harlay… d’autre part ; pour raison de touttes et chacunes les places contenues entre les deux rivières de l’isle du palais de cette Ville de Paris à nous appartenant, commençant depuis le bas du jardin du baillage jusques au Pont-Neuf et le long des deux quais qui environnent la d. isle de part et d’autre ; touttes les d. places contenant ensemble 3,120 toises 1/2, pour en jouir par le d. premier président, ses hoirs et ayans causes aux charges et conditions exprimées au d. contract d’adjudication du 10 mars 1607 par MM. les commissaires du Roi… en payant à la recette de nostre domaine, au jour de la Saint Jean-Baptiste un sol par chacune toise cy dessus de cens et rente foncière annuelle et perpétuelle, iceulz cens et rente portant lods et vente, et en outre à la charge par le d. premier président de faire bastir les d. places cy dessus, suivant le plan et devis qui en a esté dressé, le tout conformément au d. contract. Données à Paris, le 28 mai, l’an de grâce 1607, et de nostre règne le 18e, signé Henry. Registrées en la cour de Parlement le 15 novembre 1607. »
— Suivant les plans annexés à ces lettres patentes, les constructions de la place furent exécutées en pierres et briques, et de même symétrie. Cette voie publique fut appelée place Dauphine, en l’honneur du Dauphin, depuis Louis XIII. En 1792 c’était la place de Thionville. En 1814 elle reprit sa première dénomination. Deux décisions ministérielles, l’une du 14 floréal an XI, l’autre du 31 août 1819, maintinrent les dimensions de cette place. Mais en vertu d’un décret du Président de la République, L. N. Bonaparte, du 20 juin 1850, les deux issues donnant sur la rue Harlay et sur la place du Pont-Neuf devront être élargies, la première à 18 m. environ, la deuxième à 12 m. Les propriétés riveraines sont alignées, à l’exception de celles nos 27, 29, 31, 2, 4, 26 et 28.
La fontaine située au milieu de cette voie publique a été élevée en 1802 sur les dessins de MM. Percier et Fontaine, à la mémoire du général Desaix, tué à Marengo.
[Félix et Louis Lazare. Dictionnaire administratif et historique des rues et monuments de Paris. Paris, Bureau de la Revue Municipale, 1855.]
Datation de la prise de vue : vraisemblablement entre novembre 1865 et avril 1866.
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No 170 | Place Dauphine, vers le pont Neuf. Vers 1865. | ||
State Library of Victoria | Musée Carnavalet | BHVP (négatif) | |
— | CARPH000887 | — | |
— | 36.3 x 25.6 | — | |
— | 1865-1868 | — |
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La fontaine Desaix (1802)
Un concours et une souscription pour un monument à la mémoire de Louis Charles Antoine Desaix (1768-1800), général de 31 ans tué lors de la bataille de Marengo, sont lancés en juillet 1800. Sur les 128 propositions reçues, c’est celle de Charles Percier (1764-1838) qui est choisie.
La première pierre et une plaque commémorative de fondation sont posées le 25 fructidor an IX (12 septembre 1801). Les travaux de sculpture sont confiés à Augustin Félix Fortin (1763-1832) et la construction à Augustin Beudot. La fontaine est inaugurée par le Premier consul de la République le 25 prairial an XI (14 juin 1803), date anniversaire de la bataille fatale à Desaix.
Le groupe sommital, haut de 2 m 80, représente une jeune guerrière casquée, figurant le Génie militaire, qui, d’une main couronne de laurier un buste du général posé sur un socle quadrangulaire, et de l’autre, suspend un glaive à l’épaule du buste (voir dessin original plus bas). Le groupe repose sur un piédestal cylindrique décoré de figures allégoriques en ronde bosse : le Nil et l’Éridan autour d’un trophée d’armes, et deux Renomées inscrivant dans des médaillons “Thèbes, Pyramides ; Khel, Marengo”. Le piédestal repose sur un soubassement également cylindrique, comportant quatre mascarons en bronze alimentant en eau un bassin circulaire. Juste au-dessus du bassin, une plinthe de plaques de marbre porte les noms des souscripteurs.
La fontaine portait les inscriptions :
À DESAIX.
ALLEZ DIRE
AU PREMIER CONSUL
QUE JE MEURE AVEC LE
REGRET DE N’AVOIR PAS
ASSEZ FAIT POUR
LA POSTÉRITÉ.L. CH. ANT. DESAIX
NÉ À AYAT, DÉPARTEMENT DU PUY DE DÔME,
LE XVII AOÛT M.DCCLXVIII ;
MORT À MARENGO,
LE XXV PRAIRIAL AN VIII DE LA RÉPUBLIQUE
M.DCCC.CE MONUMENT LUI FUT ÉLEVÉ
PAR LES AMIS DE SA GLOIRE ET DE SA VERTU,
SOUS LE CONSULAT DE BONAPARTE,
L’AN DIX DE LA RÉPUBLIQUE
M.DCCCII.LANDAU, KEHL, WEISSEMBOURG,
MALTE,
CHEBREIS, EMBABÉ,
LES PYRAMIDES,
SEDIMAN, SAMANHOUT, KENÉ,
THÈBES,
MARENGO,
FURENT LES TÉMOINS DE SES TALENTS
ET DE SON COURAGE.
LES ENNEMIS L’APPELAIENT LE JUSTE ;
SES SOLDATS, COMME CEUX DE BAYARD,
SANS PEUR ET SANS REPROCHE.
IL VÉCUT,
IL MOURUT
POUR SA PATRIE.
L’eau de la fontaine provenait de l’aqueduc d’Arcueil.
La fontaine est démontée en 1874 pour le réaménagement de la place à l’occasion de l’achèvement du nouveau palais de Justice. On promet alors un remontage rapide, mais il n’aura jamais lieu.
Le groupe sculpté sommital, stocké au Dépôt municipal d’Auteuil, est donné par arrêté préfectoral du 8 septembre 1904 à la ville de Riom dans le Puy-de-Dôme (où on peut encore le voir, de loin, au milieu d’un rond-point automobile, place Jean-Baptiste Laurent). Des membres de la Commission du Vieux Paris sont choqués par cet “abandon”, “au mépris de tout droit”, et expriment leurs regrets. Le monument de Riom est inauguré le 22 juillet 1906. Les bas-reliefs du piédestal sont censés être restés au dépôt des œuvres de la Ville de Paris. Le musée Carnavalet conserve une petite maquette en plâtre du piédestal (CARS3493) et la plaque de cuivre placée dans les fondations de la fontaine en 1801, et découverte au démontage de 1874 (CARAI0006). Le Musée du Louvre possède des modèles en plâtre à demi-grandeur de bas-reliefs (le Nil, RF 3978A ; et les deux Renommées ou Victoires, RF 3978B et RF 3978C).
[Dessin de Charles Percier et Pierre François Léonard Fontaine. 25 x 17.9 cm. The Elisha Whittelsey Collection, Metropolitan Museum of Art, NYC.]
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Voir également :
Auteur(s) de la notice : Laurent Gloaguen.
Publié initialement le lundi 13 avril 2015.
Dernière mise à jour le lundi 15 juin 2015.
Article classé dans : Charles Marville > Vues du Vieux Paris.
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