Bourgoing, écuyer de l’Empereur, 1857

Bourgoing, écuyer de l’Empereur, 1857

« Bourgoing, écuyer de l’Empereur. » 1857.

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Baron Philippe de Bourgoing, né le 22 octobre 1827 à Nevers et mort le 20 avril 1882 à Paris. Nommé en 1852 directeur du dépôt d’étalons de Lamballe, puis directeur du haras de Charleville. En 1854, il devient écuyer de Napoléon III, puis premier inspecteur général des haras.

Outre sa carrière chevaline, Bourgoing laisse son nom dans l’histoire en étant l’homme qui a amené en France deux exemplaires vivants d’une espèce d’équidés, inconnue à l’époque et aujourd’hui disparue, l’hémippe (equus hemionus hemippus).

L’un des deux spécimens, mort le 20 janvier 1863, a été naturalisé et est conservé au Muséum d’histoire naturelle. Le crâne du second, mort le 8 mai 1865, a été retrouvé et identifié par Véra Eisenmann en 1985 ; il avait probablement perdu son étiquette d’identification lors de la crue de la Seine en 1910 qui avait submergé une partie de la collection des équidés.

En 1855, M. de Bourgoing, chargé d’une mission militaire en Orient, remarqua dans les écuries du gouverneur de Damas deux animaux que les gens du pays appelaient des Ânes sauvages ; ils avaient été donnés au sérasakier Izet-Pacha par un chef arabe nommé Atterh-Bey, et l’on assurait qu’ils étaient originaires du désert de Syrie, situé entre Bagdad et Palmyre ; mais ils étaient nouveaux pour tous ceux qui en parlaient. À la demande de M. de Bourgoing, ces animaux furent envoyés en France pour être offerts à l’lmpératrice, et Sa Majesté en fit présent à la ménagerie du Muséum où ils vécurent quelques années. Aussitôt leur arrivée, M. Isidore Geoffroy en publia une description sommaire ; il les considéra comme constituant une espèce particulière, et il proposa de donner à cette espèce le nom d’Hemippus, c’est-à-dire demi-Cheval, afin de bien indiquer que, par ses formes, elle est intermédiaire au Cheval et à l’Hémione, dont le nom signifiait primitivement demi-Âne.

Mais le jugement porté sur ce point par le naturaliste éminent que je viens de citer ne fut pas accepté par tous ses contemporains. Ainsi le prince Ch. Bonaparte le critiqua vivement, et déclara que, dans son opinion, les Équidés en question ne constituaient en réalité qu’une simple variété de l’Âne commun. M. Sclater, directeur du jardin zoologique de Londres, pense que I’Hémippe ne diffère pas spécifiquement de I’Onagre de Pallas. Enfin M. Milne Edwards, dans ses leçons orales au Muséum, soutient que I’Hémippe n’est autre chose que le véritable Hémione d’Aristote. À l’époque où ces divergences d’opinions se produisirent, on ne possédait dans aucun des musées de l’Europe les pièces nécessaires pour étudier comparativement l’Âne sauvage proprement dit, le prétendu Onagre ou Hémione de Cutch et l’Hémippe de la Syrie. Mais aujourd’hui ces objets ont été réunis au Muséum d’histoire naturelle de Paris, et par conséquent il est plus facile de discuter d’une manière fructueuse la question en litige. M. Milne Edwards a bien voulu mettre ces pièces ostéologiques à ma disposition, et elles me permettront, je crois, d’établir que l’Hémippe ne peut être confondu spécifiquement avec l’Âne sauvage, et qu’il aurait dû être appelé Hémione, car ce nom lui convient mieux encore qu’à l’animal auquel Pallas et les autres zoologistes classificateurs l’appliquent.

Afin de procéder méthodiquement dans la discussion de cette question, je la diviserai, et j’examinerai d’abord si l’Hémippe peut être considéré comme une simple variété de l’Equus asinus, ainsi que le supposait le prince Ch. Bonaparte, puis j’exposerai les raisons qui me portent à penser que le Ghor-Khur de la région indienne est non moins distinct spécifiquement du véritable Onagre ou Âne sauvage, et je chercherai ensuite si cet Hémione doit être distingué au même degré de l’Hémippe, ou si ces deux animaux ne seraient pas seulement deux variétés locales d’une seule et même espèce. Ainsi qu’lsidore Geoffroy l’a fait remarquer, l’Hémippe ressemble tant aux Hémiones, soit par la forme générale du corps, soit par sa robe isabelline avec crinière et bande dorsale noirâtre, qu’au premier abord on pourrait facilement confondre ces animaux. Mais il suffit de les examiner attentivement, ajoute cet auteur, pour être convaincu qu’ils n’appartiennent pas à la même espèce. Chez l’Hémippe, la tête est beaucoup plus petite et plus fine, les oreilles beaucoup plus courtes, et, par suite, la physionomie bien moins différente de celle du Cheval proprement dit. La queue est plus fournie de poils longs, et sous ce rapport ressemble beaucoup à celle du Bardeau ; enfin, la couleur isabelline est plus intense, et s’étend plus bas sur les flancs, sur la gorge et sur la partie antérieure des membres. lsidore Geoffroy a constaté aussi que la voix de l’Hémippe diffère de celle des autres espèces chevalines que l’on a pu observer à l’état vivant dans les diverses ménageries de l’Europe. […]

[Docteur George (laboratoire de M. le professeur Milne Edwards). Études zoologiques sur les Hémiones et quelques autres espèces chevalines.Bibliothèque de l’École des hautes études. Section des Sciences naturelles. Tome I. Victor Masson et fils, Paris. 1869.]

Hémippe

[Gravure de Marie-Firmin Bocourt (1819-1904) dans Nouvelles archives du Muséum d’histoire naturelle. Tome cinquième. Guérin et compagnie, Paris. 1869.]

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Michel Tranier s’arc-boute de tout son poids sur les lourdes armoires métalliques pour les ouvrir en les faisant glisser sur leurs rails. Apparaît alors un incroyable enchevêtrement de centaines d’animaux pétrifiés. « Mais où donc se trouve l’hémippe ? » grommelle-t-il. Il finit par repérer l’arrière-train de ce quadrupède, cousin de l’onagre, qui parcourait naguère l’Asie Mineure. « Cette espèce a totalement disparu ! s’exclame-t-il, c’est l’un des rares spécimens naturalisés qui existent au monde. » De tels trésors, le Muséum national d’histoire naturelle de Paris en possède des milliers. Tous dorment dans cet immense blockhaus souterrain, la zoothèque, sur laquelle règne Michel Tranier tel Noé sur son Arche. Ses dix-huit salles creusées sous le Jardin des Plantes, à proximité de la Grande Galerie de l’évolution, abritent 8 millions de spécimens (35 000 oiseaux, 30 000 mammifères, 500 000 amphibiens et reptiles, 400 000 poissons et 6 à 7 millions d’invertébrés). Auxquels il faut ajouter 150 millions d’insectes et 8 millions de plantes à fleurs, conservés ailleurs. Pour rassembler ces collections — qui continuent à s’accroître chaque jour ! —, des milliers d’explorateurs, de naturalistes, de navigateurs et de missionnaires ont écumé chaque recoin de la planète depuis trois siècles. Noyés lors d’une tempête, emportés par la malaria, percés par des sagaies ou déchiquetés par un animal, nombre de ces chasseurs de peaux y ont laissé la leur. Et c’est souvent la quête du plus banal coquillage, de la fleur la plus anodine qui a déclenché les plus fabuleuses odyssées. Pour illustrer sa nouvelle exposition temporaire « Nature vive » [jusqu’au 17 septembre 2001], le Muséum a sélectionné 600 spécimens extraordinaires qui déclenchent chez le visiteur une véritable émotion. Certains d’entre eux ont une histoire proprement sidérante. Voici les plus extraordinaires :

L’hémippe : pour Eugénie, de la part du pacha. Encore un de ces damnés de la Terre qui n’existent plus qu’empaillés. Les derniers individus de cette espèce, voisine de l’onagre, disparurent vers 1927 des rives nord de l’Euphrate, où ils avaient cherché refuge. Ce spécimen, conservé par le Muséum, avait été, ainsi qu’un deuxième, ramené vivant en 1855 par M. de Bourgoin, écuyer de Napoléon III. Celui-ci les avait découverts dans les écuries du gouverneur de Damas. Ils avaient été capturés dans le désert, entre Damas et Palmyre. Aussitôt, le pacha d’Égypte (il régnait alors sur la région) en fit don à Eugénie, qui les remit au zoo du Jardin des Plantes. Confondus avec des onagres de Perse, ils furent placés dans le même enclos. C’est Isidore Geoffroy Saint-Hilaire qui s’avisa de leur différence. Il les décrivit et fit ainsi naître une nouvelle espèce pour la science. Il leur donna le nom d’« hémippe ». Ce couple disparut entre 1860 et 1870 et l’un des deux fut naturalisé.

[Frédéric Lewino. Le Point. 19 janvier 2001.]

  • 1. Le 18 avril 2014,
    Stéphane

    Bizarre, la photo semble avoir été trafiqué en niveau des pieds du sieur de Bourgoing

  • 2. Le 18 avril 2014,
    Vergue

    C'est une retouche d'époque sur le négatif pour masquer le pied du support qui aide le modèle à tenir la pose.

  • 3. Le 19 avril 2014,
    Stéphane

    À cause de la durée du temps de pause? C'est vrai que faire la statue absolue pendant une trentaine de seconde ne devait pas être toujours facile...

  • 4. Le 19 avril 2014,
    Vergue

    Oui. Précisément.