Place Saint Médard, 1898

Eugène Atget, place Saint-Médard

Place Saint Médard. Paris Ve. 1898.

Version haute définition : 2200 x 2714 pixels.

Atget est au coin des rues Mouffetard, Broca (section aujourd’hui appelée rue Édouard Quénu) et Pascal.

Ce cliché est appelé “Place Saint-Médard”, mais à ma connaissance, cette place n’a jamais eu d’existence. Il s’agit de la rue Mouffetard.

Quand vous voyez cette église, souvenez-vous de ce grand miracle de la Foi : les sauteuses et les miaulantes de Saint-Médard.

SAINT-MÉDARD (église) située rue Mouffetard, 141.

Existant déjà au XIIe siècle, cette église paraît avoir été construite par l’abbaye de Sainte-Geneviève, pour les habitants du village de Saint-Mard ou Saint-Médard, qui dépendait de cette abbaye. Elle fut réparée et agrandie de 1561 à 1655. En 1784, on y fit de nouvelles modifications.

Cette vieille église a acquis une certaine célébrité par les guerres religieuses qu’elle eut à soutenir. En 1561, deux mille protestants l’assiégèrent; au XVIIe siècle, des scandales et des extravagances de toutes sortes eurent lieu au sujet du défunt diacre François Paris et des Jansénistes. « Ce diacre Paris, disent les frères Lazare, faisait beaucoup de bien aux pauvres, il instruisait leurs enfants, et encourageait les ouvriers en travaillant avec eux, lorsque cet excellent homme mourut le 1er mai 1727, sa mort fut un grand événement dans le quartier, et les Jansénistes, qui, à cette époque gémissaient sous l’oppression la plus rigoureuse résultant de la bulle Unigenitus profitèrent de cet événement pour venir manifester sur la tombe du diacre Paris, qu’ils voulaient honorer comme un saint. Bientôt ils y vinrent en foule; parmi ces enthousiasmés, on voyait quelques jeunes filles, qui fortement émues par les persécutions qu’exerçait le gouvernement, où déjà atteintes de convulsions naturelles à leur âge, en éprouvèrent d’extraordinaires en priant Dieu sur cette tombe formée d’une table de marbre noir, élevée de terre d’environ trente centimètres, soutenue par quatre socles de pierre et ornée d’une épitaphe en lettres d’or. »

Dans le commencement, le nombre des actrices qui piétinaient sur cette tombe fut peu considérable, mais en 1729, près de huit cents personnes se dirent atteintes de convulsions. Dès qu’une jeune fille avait touché la pierre de ce tombeau, elle était prise de violentes agitations, celles qui gambadaient, avaient reçu le nom de sauteuses, celles qui hurlaient comme les chiens ou les chats s’appelaient : aboyeuses ou miaulantes.

Pierre Nicole racontait à ses amis, l’histoire arrivée dans une communauté de Paris très nombreuse dont les religieuses, chaque jour à la même heure « étaient prises d’un accès de vapeur, qui les faisait miauler en chœur pendant des heures entières. Ces miaulements quotidiens étalent scandaleux ; pour les faire cesser, on imagina de frapper fortement leur imagination, et de leur déclarer que les magistrats enverraient aux portes du couvent, une compagnie de soldats, chargés au moindre “miaulement” qu’ils entendraient, d’entrer armés de verges dans l’intérieur, et d’y fustiger sans miséricorde, les religieuses miaulantes ». Elles en furent tellement effrayées qu’elles se turent comme par enchantement… et ne miaulèrent plus.

Toutefois, c’était partout un désordre épouvantable. Le gouvernement instruit de ces scènes ridicules et scandaleuses, prescrivit le 27 janvier 1733, la fermeture du cimetière Saint-Médard. — Le lendemain on trouva sur la porte du cimetière l’épigramme suivante :

De par le Roy, deffence à Dieu,
De faire miracle en ce lieu.

Ainsi prirent fin « les miracles de Saint-Médard ».

[Gustave Pessard. Nouveau dictionnaire historique de Paris. Paris, Eugène Rey, 1904.]

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